La médecine dans l’antiquité grecque et latine
Une séquence proposée par Christine BATUT-HOURQUEBIE,
professeur de lettres classiques au collège de Saint-Leu d’Esserent (60)
Classe de quatrième
Objectif lexical : Identifier et acquérir le vocabulaire du champ lexical du corps au programme de quatrième : caput, manus, pectus,sanguis, substantifs auxquels on pourra adjoindre oculus et os qui n’apparaissent pas dans le texte mais qui sont au programme et naris, labia et artusqui apparaissent dans le texte mais qui ne sont pas au programme.
Le vocabulaire spécifique à la médecine est plus restreint : medicus et discipulus. Pour souligner le registre pathétique de la première partie du texte, on pourra étudier en parallèle le lexique de la mort et de la douleur dolor, lacrima, quies, mors (vocabulaire de 5ème), auxquels on pourra ajouter morbus qui sera utile lors de l’évaluation finale et desiderium au sens de regret, vocabulaire plus souvent présent dans les textes sur la médecine que le lexique de la guérison et de la joie (gaudium pouvant toujours être donné à apprendre au titre d’antonyme de tristesse, l’adjectif tristis est au programme de 4ème).
Objectifs linguistiques : Revoir la formation des temps verbaux et identifier les participes présents.
Objectifs culturels : Appréhender les différentes facettes de la médecine dans l’antiquité.
Mieux connaître le patrimoine picard au travers de l’étude iconographique d’une stèle funéraire, d’un sarcophage et d’un cachet d’oculiste.
Objectif littéraire : Lire des extraits d’un texte narratif en langue latine : Historia Apollonii regis Tyri, roman latin du VIème siècle. De plus larges extraits peuvent être exploités à partir du site Collatinus : http://www.collatinus.org/apollonius1.htm
Séance n°1
:
Objectif culturel : présenter la médecine sous son aspect
mythologique.
Objectif linguistique : traduction sans dictionnaire de dictons
Exposé réalisé par un élève sur le mythe d'Esculape
Traduction de dictons latins concernant la médecine
· On pourra commencer par traduire la célèbre citation Mens sana in corpore sano de Juvenal, Satires 10, 356.
·Les quatre dictons suivants présentent la médecine sous un jour des plus favorables :
Nulla res tam necessaria est quam medicina.
Omnium artium medicina nobilissima est.
Per scientiam ad salutem aegroti.
Praesente medico nihil nocet.
Et ce dernier dicton souligne à quel point les Romains ont eu à coeur de
s'approprier les connaissances grecques pour faire de la médecine un art latin :
Nulla est medicina sine lingua Latina.
Séance n°2 : La mort de la princesse
Objectifs linguistiques : revoir la formation du présent et du parfait. Découvrir les participes présents.
Objectif littéraire : lire un extrait d'un texte narratif latin à l’aide de sa traduction.
Apollonius, roi de Tyr, fuit les hommes du roi d'Antioche qui veulent le tuer. Après avoir perdu tous ses biens dans un naufrage, il est recueilli par le roi de Cyrène, qui le charge d'instruire sa fille. La princesse tombe bientôt amoureuse de son maître. Le roi, qui apprécie beaucoup le jeune homme, consent à les unir. Après leur mariage, alors que la princesse est enceinte, Apollonius apprend la mort du roi d'Antioche et de sa fille. Tyr, son pays, l'attend. Avec la permission du roi de Cyrène, le couple s'embarque pour Tyr. Au milieu de la traversée, la princesse meurt en donnant la vie à une fille.
Jussit loculum mitti in mare cum amarissimo fletu. Tertia die eiciunt undae loculum : venit ad litus Ephesiorum, non longe a praedio cuiusdam medici, qui in illa die, cum discipulis suis deambulans iuxta litus, vidit loculum effusis fluctibus jacentem et ait famulis suis : "Tollite hunc loculum cum omni diligentia et ad villam afferte !" Quod cum fecissent famuli, medicus libenter aperuit et vidit puellam regalibus ornamentis ornatam, speciosam valde et in falsa morte jacentem et ait : "Quantas putamus lacrimas hanc puellam suis parentibus reliquisse !" Et videns subito ad caput eius pecuniam positam et subtus codicillos scriptos ait : "Perquiramus, quid desiderat aut mandat dolor." |
Pleurant les larmes les plus amères, il ordonna que le cercueil
fût déposé sur la mer. Deux jours plus tard, les flots
rejetèrent le cercueil : il aborda au rivage d'Ephèse, non loin
de la propriété d'un médecin qui, ce jour-là,
se promenant le long du rivage avec ses élèves, vit le cercueil
déposé par les flots qui s'étaient retirés,
|
Activités autour du texte narratif :
1. Identifier les différents personnages du texte en français puis en latin.
2. Surligner de différentes couleurs les verbes qui les accompagnent.
3. A partir des temps primitifs, identifier les temps latins, les mettre en relation avec la situation d’énonciation, voir si la traduction respecte les temps du texte latin.
4. Identifier le participe présent, trouver à quelle déclinaison il appartient grâce aux nominatifs et accusatifs du texte.
Séance n°3 : Les préparatifs des funérailles
Objectif lexical : découvrir le champ lexical des funérailles à partir de photographies du Musée de Picardie.
Objectif littéraire : lire en lecture cursive la suite du texte en latin sans traduction française.
Civilisation : incinération et inhumation
Lecture de l’image : un tombeau gallo-romain
On pourra étudier quelques mots appartenant au champ lexical des funérailles et de la douleur :
On indiquera aux élèves que la crémation était répandue dans l’antiquité, ce qui permettra de préciser le sens du mot rogus, i m. : bûcher [funèbre]. Le terme “incinération“ donnera l’occasion d’un travail sur la formation des mots.
Qui cum resignasset, invenit sic scriptum 'Quicumque hunc loculum invenerit habentem in eo XX sestertia auri, peto ut X sestertia habeat, X vero funeri impendat. Hoc enim corpus multas dereliquit lacrimas et dolores amarissimos. Quodsi aliud fecerit, quam dolor exposcit, ultimus suorum decidat, nec sit, qui corpus suum sepulturae commendet'. Perlectis codicillis ad famulos ait : "Praestetur corpori, quod imperat dolor! Juravi itaque per spem vitae meae in hoc funere amplius me erogaturum esse, quam dolor exposcit." Et haec dicens jubet continuo instrui rogum. Sed dum sollicite atque studiose rogus aedificatur atque componitur, supervenit discipulus medici, aspectu adulescens, sed, quantum ingenio, senex. Hic cum vidisset speciosum corpus super rogum poni, intuens magistrum ait : "Unde hoc novum nescio quod funus?" Magister ait : "Bene venisti, haec enim hora te expectat. Tolle ampullam unguenti et, quod est supremum, defunctae corpori puellae superfunde." |
Compréhension du texte : après avoir demandé aux élèves quel nouveau personnage fait son apparition dans cet extrait, on leur demandera de rédiger en quelques lignes le sens général du texte, en français et/ou en latin...
Pour parfaire cette étude sur les funérailles, on pourra présenter aux élèves une stèle funéraire (Musée de Picardie), leur demander de la lire et de la traduire en leur indiquant les différentes abréviations couramment employées (cf. “Les inscriptions funéraires“ http://www.ac-amiens.fr/pedagogie/lettres/Latgrec/la1.htm )
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D(is) M(anibus) SATRIAE CRATIAE Q(ui) Δ VIXIT ANNIS Δ XVIII M(ensibus) Δ X DIEBUS III GELOS PATER FILIAE CARIS SIME FECIT |
Séance n°4 : Le miracle
Objectif lexical : le champ lexical du corps
Objectif littéraire : lire en lecture cursive la suite du texte en latin sans traduction française.
Après avoir distribué une reproduction (sans légende) d’une photographie de ce squelette gallo-romain, on pourra prendre la lecture du texte en demandant aux élèves de repérer les noms communs que permettent de la légender ; on complètera la légende par quelques autres noms communs au programme (cf. Objectif lexical).
At vero adulescens tulit ampullam unguenti et ad lectum devenit puellae et detraxit a pectore vestes, unguentum fudit et omnes artus suspiciosa manu retractat, sentitque a praecordiis pectoris torporis quietem. Obstupuit juvenis, quia cognovit puellam in falsa morte jacere. Palpat venarum indicia, rimatur auras narium ; labia labiis probat : sentit gracile spirantis vitam prope luctare cum morte adultera et ait : "Supponite faculas per IIII partes." Quod cum fecissent, tentat lentas igne supposito retrahere manus, et sanguis ille, qui coagulatus fuerat, per unctionem liquefactus est. |
Si le texte sans traduction vous semble trop difficile pour vos élèves, donnez-en la traduction à l’un d’eux, qui mimera la scène au fur et à mesure de la lecture. Des extraits seront à apprendre par coeur pour la séance suivante.
Séance n°5 : La réalité du métier
On
demandera à quelques élèves de mimer devant leurs camarades ce que d’autres
réciteront.
On
procédera ensuite à l’examen des objets médicaux
présentés au musée de Picardie.
Traduction du cachet d'oculiste.
Séance n°6 : Miracle ou charlatanisme
Objectif linguistique : travailler à partir d’une traduction réalisée dans une langue étrangère
Les Romains ne portaient pas tous un regard indulgent sur la médecine.
"Until recently, Diaulus was a doctor; now he is an undertaker. He is still
doing as an undertaker, what he used to do as a doctor." (Martial,
Epigrams 1.47)
Nuper erat medicus, nunc est uispillo Diaulus:
quod uispillo facit, fecerat et medicus.
"You are now a gladiator, although until recently you were an
ophthalmologist. You did the same thing as a doctor that you do now as a
gladiator." (Martial, Epigrams 8.74)
Oplomachus nunc es, fueras opthalmicus ante.
Fecisti medicus quod facis oplomachus.
"I felt a little ill and called Dr. Symmachus. Well, you came, Symmachus, but
you brought 100 medical students with you. One hundred ice cold hands poked and
jabbed me. I didn't have a fever, Symmachus, when I called you, but now I do."
(Martial, Epigrams 5.9)
Languebam: sed tu comitatus protinus ad me
uenisti centum, Symmache, discipulis.
Centum me tetigere manus aquilone gelatae:
non habui febrem, Symmache, nunc habeo.
Séance n°6 : Evaluation
1. Thème d’imitation :.
Après la mort de sa femme, Appolonius la (eam) mit dans un cercueil et la jeta à la mer (unda, ae f). Un médecin se promenant avec ses disciples trouva le cercueil et découvrit la jeune femme gisant dans une fausse mort. Un [de ses] disciples, voyant le corps de la jeune femme, frotta ses membres grâce à un onguent et sentit alors son souffle et son sang [battre].
2. Questions de civilisation :
- Résumez la légende du dieu grec de la médecine.
- Que savez-vous de la pratique des funérailles dans l’antiquité ?
- Quels jugements les Romains portaient-ils sur leurs médecins ? Pourquoi?
3. Dans cet extrait de l’ Historia Apollonii regis Tyrii :
Rex autem post paucos dies tenens Apollonium manu forum petit et cum eo deambulavit. Iuvenes scolastici III nobilissimi, qui per longum tempus filiam eius petebant in matrimonium, pariter omnes una voce salutaverunt eum. Quos videns rex subridens ait illis: "Quid est hoc, quod una voce me pariter salutastis?" Unus ex ipsis ait: "Petentibus nobis filiam vestram in matrimonium tu saepius nos differendo fatigas: propter quod hodie una simul venimus. Elige ex nobis, quem vis habere generum."
Notes : peto, is, ere in matrimonium : demander en mariage
gener,eri n. : gendre (beau-fils : mari de la fille)
- Soulignez de couleurs différentes les personnages.
- A quel temps se trouve salutaverunt? Pourquoi ? Quel est son sujet ? Quel est son complément d’objet direct ? Qui désigne-t-il ?
- Identifiez les mots en vert. A qui se rapportent-ils ?
A partir de la phrase : “Petentibus nobis filiam vestram in matrimonium tu saepius nos differendo fatigas“ (En différant trop souvent, tu nous lasses lorsque nous demandons votre [ta] fille en mariage.), proposez une autre traduction de petentibus et de differendo (groupe nominal ou propostion subordonnée).
- A votre avis, que demandent les jeunes gens dans la
dernière phrase ?
- Cet extrait se déroule-t-il avant ou après celui que nous avons étudié ? Justifiez votre réponse.
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